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Travail : et si les jeunes étaient plus courageux que leurs aînés ?

Les jeunes sont critiqués sur leur rapport au travail.
Ils osent dire non à un bel avenir pour privilégier le bonheur au travail. Et ça c’est une forme de courage non ?
métiers manuels

On entend souvent les critiques sur le peu de valeur que nos jeunes accordent au travail. Pourtant ils sont toujours nombreux à embrasser de longues études, écoutant leurs parents qui leur promettent un bel avenir.
Ingénieurs, thésards ou consultants, ils ont toutes les cartes en mains pour s’assurer une place sous le soleil de l’entreprise. Sauf que le bonheur n’est pas toujours là où on l’attend, et que CDI, voiture de fonction, RTT et collègues de bureau ne riment pas forcément avec idéal de vie.

En tout cas pas pour un certain nombre d’entre eux.

Déçus par le monde du travail

Eux, ce sont ces Bac+5 qui ont fait le choix de troquer la cravate et le tailleur pour une salopette et un marteau. Alors que leurs aïeux se sont battus pendant des années pour atteindre un niveau d’études suffisant leur permettant de s’asseoir sur les bancs de la fac, ces jeunes diplômés ou surdiplômés ressentent pour leur part le besoin de revenir à quelque chose de plus concret.

Ils voient en entreprises les cas de burn-out et de dépression qui augmentent chez les cadres, de la souffrance au travail, une course à la productivité, un désengagement des salariés de plus en plus marqué. Ils ont autour d’eux des cadres qui expriment l’absurdité de leur quotidien professionnel. Ils sont défaitistes (ou lucides) : 76 % des jeunes travailleurs français pensent que leurs perspectives d’emplois sont pires que celles de la génération de leurs parents (étude Infosys).

On leur a vendu un système de « carriérisme » – avec la caricature facile opposant les cols blancs aux cols bleus – et cela n’est plus en phase avec leurs attentes ni avec leur vision du monde. Ces nouveaux travailleurs cherchent à retrouver des valeurs humaines quasi inexistantes dans leur sphère professionnelle. Ils ont des convictions et entendent bien les suivre pour donner un sens à leur vie.
Ce besoin d’autonomie et d’épanouissement pro et perso est d’ailleurs une des caractéristiques fortes de nos générations Y, Z et autres Millenials, qui plébiscitent des fonctions tournées vers l’humain, les autres, le bien-être…

Il y a ceux qui trouvent leur compte dans l’entreprise en « imposant » leur mode de fonctionnement, et ceux qui décident de faire le grand saut et d’endosser un bleu de travail.

Du concret, de la passion et de l’utile

Ebénistes, maçons, aides à domicile, couturières ou charpentiers sont autant de métiers plébiscités par ces « self-patrons ». Vous n’avez pas pu passer à travers cet effet de masse fortement médiatique : la presse en a fait un nouveau marronnier et nous ressert chaque année les exemples de ces nouveaux travailleurs las d’élaborer des stratégies abstraites sur le long terme. Ce qu’ils décrivent le plus ? L’envie de créer quelque chose d’utile : « une thèse ne produit pas de concret. Or, produire quelque chose apporte une joie intense », raconte Jennifer, ex doctorante, tout juste diplômée d’un CAP et d’un Bac Pro ébénisterie.
Ils lâchent tout pour reprendre des études et monter leur petit commerce, leur ferme, leur atelier, leur boutique, leur épicerie… Passionnés, ils ne comptent pas leurs heures, qu’ils ne voient plus passer de toute façon.

A une époque où l’avenir économique fait toujours aussi peur, où l’enseignement se rapproche enfin du monde de l’entreprise, et où on sait que nos enfants auront plusieurs métiers dans leur vie professionnelle, les formations sur les métiers manuels prennent de plus en plus de force.
La prise de conscience écologique, le refus de la surconsommation, la préservation de la planète sont autant d’actions qui prônent le retour au concret, à l’utile, à la passion du faire.
Il semblerait que les diplômes en cuisine, en boucherie, ou en plomberie cartonnent. Les métiers d’artisans et les métiers d’art notamment n’ont jamais été aussi séduisants. Les métiers dits intellectuels ou les fonctions supports perdent de leur intérêt.

Les métiers les plus demandés

Dans tous les cas, cette appétence pour les métiers manuels répond à un nombre d’offres d’emploi conséquent et en progression. Il faut dire que l’amalgame est fort entre métier manuel et métier non qualifié (on sait que les chiffres du chômage ne concernent que peu les fonctions cadres). Un sondage Qapa récent (auprès de 4,5 millions de candidats) montre un engouement de plus en plus fort pour les métiers manuels et des recrutements qui s’intensifient d’année en année. Ces métiers concernant essentiellement des jobs techniques ou ceux du « care ».
Selon cette étude*, en mai 2019, les 14 métiers manuels les plus demandés sont : Manutentionnaire, Aide à domicile, Agent d’entretien, Préparateur de commande, Serveur, Aide-soignant, Commis de cuisine, Chauffeur poids-lourds, Mécanicien, Électricien, Maçon, Coiffeur, Boulanger et Boucher.

Tu seras maçon mon fils

Cela dit, on vit un changement de perception notable : pour 63% des Français les métiers manuels ont le vent en poupe actuellement. Et pour 84% d’entre eux, ces métiers ne disparaîtront jamais*.

Mais les parents sont-ils vraiment prêts à recommander des formations qualifiantes courtes plutôt que de grandes études ? Si votre fils vous dit demain vouloir travailler de ses mains, au grand air, en équipe, construire des lieux de vie, rencontrer plein de gens différents, peut-être entreprendre et bien gagner sa vie… Lui direz-vous « tu seras maçon mon fils » ?

Mais peut-être sera-t’il, lui, plus à l’aise pour choisir que vous ne l’auriez été.
Dans la capacité au changement comme dans l’alignement attendu entre leurs valeurs personnelles et leur travail, les jeunes sont dans la prise de position. Et assument leur choix.

Du courage on vous dit.

 

Sources : Insee, Onisep, Qapa*

Un commentaire sur “Travail : et si les jeunes étaient plus courageux que leurs aînés ?”

Jadot dit :

Il faut fuir les généralités autant que la peste et le choléra. Non les jeunes ne sont pas plus exigeants, moins courageux que leurs aïeux dont je fais partie. Ils sont tout aussi volontaires, tout aussi déterminés … mais il y a une différence majeure. Ils sont plus lucides sur le monde du travail, les perspectives de l’emploi. Pourquoi ? Parce qu’ils n’ont pas le choix, s’ils ont des rêves, un génie ne va pas les exaucer, il faudra qu’ils se battent, plus ardemment encore que leurs aïeux. Ils n’ont donc pas besoin des leçons et des jugements trop hâtifs des générations précédentes dont certaines ont connu une période tellement plus favorable à l’emploi. Courage, “La jeunesse est le temps qu’on a devant soi. ” écrivait Jules Romain.

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